Le congé en matière de bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989 (hors locations meublées)
La semaine dernière, une voisine qui est locataire de son appartement, m’a informée qu’elle venait de recevoir un congé pour vente.
Son bailleur lui a demandé de libérer son logement à l’échéance de son bail dans moins de 3 mois.
Ma voisine est titulaire d’un bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989.
Le local a été loué vide (ce qui a son importance dans notre affaire!)
Ma voisine n’étant pas au fait avec les règles applicables, n’avait pas relevé que le congé qui lui a été donné n’était pas valable.
En effet, son propriétaire aurait dû lui adresser le congé au moins 6 mois avant le terme du bail (et non 3 mois) car il ne s’agissait pas d’une location meublée.
C’est la raison pour laquelle, il m’a semblé nécessaire de rappeler les règles applicables en la matière.
Attention : cet article ne porte que sur la location de logements vides. Les locations meublées sont soumises à des règles différentes.
I- Le congé donné par le locataire
a) A quel moment le locataire peut-il donner son congé?
Le locataire peut donner congé à son bailleur à tout moment du bail à condition de respecter un préavis.
b) Le délai de préavis
Le point de départ du préavis est la date de réception du congé (et non sa date d’envoi)
Le délai de préavis est de 3 mois.
Il peut être réduit à 1 mois dans certains cas liés :
- à la localisation du logement : bien situé en zone tendue
- à la situation du locataire : 1er emploi, mutation, perte d’emploi, bénéficiaire du RSA, de l’AAH, locataire de plus de 60 ans dont l’état de santé nécessite un changement de domicile, violences conjugales…)
Attention : pour pouvoir bénéficier du préavis réduit, vous devez impérativement le signaler dans la lettre signifiant le congé et joindre le justificatif.
A défaut, c’est le délai de 3 mois qui s’applique.
c) Le formalisme
Le congé doit être donné soit :
- Par lettre recommandée avec accusé de réception
- Par acte de Commissaire de Justice (anciens huissiers)
- Par lettre remise en main propre contre récépissé
Attention : le congé donné par mail n’est pas valable, même si le bailleur en a accusé réception.
d) Le motif du congé
Le locataire n’a pas à motiver son congé, sauf s’il sollicite l’application d’un délai de préavis réduit.
II- Le congé donné par le bailleur (propriétaire)
Les conditions du congé donné par le bailleur sont plus restrictives.
a) A quel moment le bailleur peut-il donner congé à son locataire?
Contrairement au locataire, le bailleur ne peut pas donner congé à son locataire à n’importe quel moment du bail.
Il ne peut le faire qu’à l’expiration du bail, ou de son renouvellement, en respectant un délai de préavis.
b) Le délai de préavis
Le bailleur doit respecter un délai de préavis d’au moins 6 mois avant la date d’expiration du bail (ou de son renouvellement).
Dans le cas de ma voisine, le congé a été délivré trop tard.
Afin d’être certain de respecter les délais, le bailleur peut notifier le congé bien avant ce délai de 6 mois.
Toutefois, le préavis ne commencera à courir que 6 mois avant la date d’expiration du bail et le congé ne sera effectif qu’à l’expiration du bail.
c) Le formalisme
Il est identique à celui requis pour le locataire : lettre recommandée avec accusé de réception, acte de Commissaire de Justice, remise de lettre en main propre contre récépissé.
Dans le cadre d’un congé pour vente ou pour reprendre, le bailleur devra joindre au congé la notice d’information relative aux obligations du bailleur et aux voies de recours et d’indemnisation du locataire.
d) Le motif du congé
Le bailleur doit préciser le motif du congé.
Il n’a la possibilité de donner congé que pour 3 motifs :
- Le congé pour vendre
Pour information : le bailleur peut parfaitement vendre le bien occupé. Dans ces conditions, le locataire ne dispose d’aucun droit de préemption sur le bien. Le bail se poursuivra dans les mêmes conditions avec le nouveau propriétaire.
En revanche, les choses sont différentes si le bailleur souhaite vendre le logement libre de toute occupation.
Dans cette hypothèse, le locataire bénéficie d’un droit de préemption, c’est-à-dire qu’il est prioritaire sur l’achat du bien loué durant les 2 premiers mois du préavis.
Par exception, le locataire ne bénéficie pas de ce droit, si le bien est vendu à un proche parent du bailleur, jusqu’au 3ème degré inclus, pour habiter.
L’acquéreur devra alors occuper le logement pendant au moins les 2 années suivant l’expiration du préavis.
Le congé pour vendre vaut offre de vente au locataire.
C’est la raison pour laquelle, outre le respect des délais et du formalisme évoqué précédemment, la lettre congé devra notamment préciser le prix et les conditions de la vente.
Si le locataire ne formalise pas sa volonté d’acquérir le bien dans les 2 premiers mois du préavis, il ne sera plus prioritaire.
En cas de baisse du prix de vente fixé initialement, le bailleur devra notifier une nouvelle offre à son locataire mentionnant les nouvelles conditions.
Le locataire sera alors à nouveau prioritaire mais uniquement pendant 1 mois.
- Le congé pour reprise
Le bailleur peut donner congé pour habiter lui-même le logement ou l’un de ses proches.
L’article 15 de la loi du 6/07/1989 fixe la liste limitative des bénéficiaires autorisés : outre le propriétaire personne physique ou membre d’une indivision ou d’une SCI familiale, il s’agit du conjoint, du partenaire lié par un PACS ou concubin notaire depuis plus d’un an, les ascendants, descendants ou ceux du conjoint, du partenaire ou du concubin notaire.
Le congé devra respecter les délais et le formalisme mentionnés précédemment mais également préciser :
- Le motif du congé et justifier le caractère réel et sérieux de sa reprise
- Le nom et l’adresse du bénéficiaire de la reprise
- Le lien de parenté
Le bien devra alors constituer la résidence principale du bénéficiaire.
- Le congé pour motif légitime et sérieux (article 15 de la loi du 6 juillet 1989)
Le congé pour motif légitime et sérieux peut être lié :
- Au comportement du locataire que le bailleur entend sanctionner : défaut de paiement du loyer, nuisances, non-respect du règlement de copropriété…
- A un motif sans lien avec le locataire tel que, par exemple, la réalisation d’importants travaux de réhabilitation du logement
e) Les locataires protégés
Certains locataires sont protégés par la loi.
Tel est notamment le cas du locataire de plus de 65 ans (ou qui héberge une personne de plus de 65 ans) et dont les revenus sont inférieurs à certains plafonds (fixés en fonction de la localisation du logement et de la catégorie de personne).
Ces dispositions ne s’appliquent pas si le bailleur est lui-même dans la même situation.
f) Que se passe-t-il si le locataire se maintient dans les lieux ?
Si le locataire ne quitte pas le logement spontanément à la date requise, le bailleur ne peut l’expulser de son propre chef.
Il devra saisir le juge des contentieux de la protection pour faire constater la validité du congé et pouvoir procéder à l’expulsion du locataire.
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